Une p'tite dernière pour la route
Pour honorer cette performance exceptionnelle, unissons-nous pour réaliser l'incroyable salto arrière et jouer un sale tour au temps en l'arrêtant, Big, Bang sur-le-champ.
Pour honorer cette performance exceptionnelle, unissons-nous pour réaliser l'incroyable salto arrière et jouer un sale tour au temps en l'arrêtant, Big, Bang sur-le-champ.
Par Mario Courchesne [12/04/2024]
Chers amis, nous y voici rendus, vous en tant que lecteurs, lectrices, moi en tant que chroniqueur de L'annonceur, à cette intrigante croisée des chemins, à la fin d'une belle aventure, souvent trippante, parfois moche, et, il faut le dire, certaines chroniques plates à mort, à vous de juger. Donc nous voilà arrivés à l'aube d'une trajectoire nouvelle. État de bien-être satisfaisant de la besogne bien accomplie, mais aussi, sensation quelque peu inquiétante d'être transportés vers ce non-lieu, ce non-dit qui nous mènera partout et nulle part en même temps. Qui allons-nous rencontrer ? Allons-nous faire vraiment connaissance, ami mon frère, âme sœur, bête de somme, amour infini, étranger venant du lointain ? Quelles vibrations sensorielles allons-nous ressentir au-delà de ses chemins de traverse? Serons-nous épris de rêves, prisonniers du réel, enjôlés par son imaginaire, créateurs de lumières ou de ténèbres, qui sait ? Que seront tous ces demains, ces peut-être, ces humains, ces paysages ? Qu'adviendra-t-il de nos quatre saisons ? Serons-nous corps et âme engloutis dans les marais sans fond du lac Saint-Pierre figé par la froidure de l'hiver, pieds nus, déambulant trèfles aux genoux sur la fraîche rosée matinale dans les terres de nos ancêtres, égarés en forêt d'érables, de chênes et de liards dominant la croix d'église du centre-ville de mon village, chemin de la Coulée, rue Principale, emportés aux quatre vents comme feuilles mortes automnales virevoltant avec grâce pour reconquérir spirituellement le vaste territoire autochtone ? Il y a tant à dire, et tant d'histoires à raconter, chacun de vous en avez de passionnantes en tête le cœur chargé d'émotions. Pour ma part, l'inspiration n'a pas toujours été au rendez-vous. Je cognais à sa porte et sa muse coquine s'amusait à me torturer l'esprit face à l'horrible page blanche que je devais noircir, supplice extrême des écrivains que je ne suis pas. Écriveux d'occasion me convient mieux.Cette réflexion me ramène en mémoire toutes ces années délirantes de créations théâtrales en compagnie d'enfants, d'adolescents et d'adultes pour qui nous avons réalisé à une vitesse folle, ma douce et moi, une multitude de pièces de théâtre et donné vie sur papier à des personnages que ces comédiens, comédiennes en herbes ont incarnés sur scène. Les soirs de première régnaient au sein de la troupe cette impalpable fébrilité, ce vlimeux trac quasi incontrôlable. Ils étaient aux prises avec un cœur palpitant à vive allure voulant sortir de leurs poitrines, ne sachant plus leur réplique juste avant d'entrer en scène, et là, grâce au public présent dans la salle, leurs personnages prenaient le contrôle de leurs émotions et comme par magie ils s'éclataient devant les spectateurs ébahis. Méchante drogue dure j'vous dis. On en demande et redemande encore et encore. À la tombée du rideau, les frissons corporels étaient à l'extrême lorsque retentissaient les chaleureux applaudissements de la part des parents et des amis présents. Et, inévitablement, s'en suivait l'inexorable soir de dernière. Après le tumulte des bravos, la comédienne en pleurs, seule avec elle-même, se retrouvait avec son costume d'apparat et son personnage qu'elle accrochait à tout jamais au fond du placard. Gloire éphémère, tel est le destin, pour les acteurs et les auteurs de productions amateurs tout à fait respectables que nous avons pu signer, à des années-lumière des Tremblay, Molière, Lepage et j'en passe… Il en est ainsi de mes chroniques. Avez-vous déjà tenté d'imaginer la quantité astronomique d'écrits de tout genre voués à choir dans la bibliothèque de l'oubli du temps perdu depuis que les humains maîtrisent l'art de l'écriture ? De nos jours, ces propos se retrouvent dans le fameux nuage informatique et plusieurs d'entre eux obscurcissent inutilement la clarté du message et assombrissent la beauté du ciel bleu.
Avant de m'éclipser totalement dans la pénombre grâce au passage de la lune devant l'astre du jour j'aimerais profiter de cette petite dernière pour louanger et honorer deux précieux amis qui me sont très chers. Véritables bourreaux de travail et tyrans, heureusement envers eux-mêmes, ils n'ont pas hésité une seconde pour me fouetter la caboche afin que je daigne poser mon humble griffe littéraire dans leur journal. Au départ, ce contrat alléchant ne devait durer que quelques mois, suffisamment pour combler tous mes besoins de joyeux retraité, mais l'arrivée inattendue et fracassante de la Covid 19 et de la pandémie qui s'en est suivie a provoqué une grossesse de quatre années supplémentaires où je devais accoucher environ une fois par mois d'un petit mot, d'un mignon bébé grassouillet comme moi. Durant toute cette période, côtoyer Jocelyne et François, ces deux passionnés, m'a grandement enrichi en relation humaine. Je les en remercie vivement. Ces deux grands manitous ont tenu, à bout de bras, sans oublier l'aide de Thérésa et d'une multitude de collaborateurs et de collaboratrices, le journal L'annonceur bien vivant pendant plus de vingt ans. Considérant toutes les difficultés qu'on ne peut imaginer, maintenir un journal indépendant dans notre coin de pays relève d'une véritable prouesse olympique.
Peuple du Grand Pierreville.
Pour honorer cette performance exceptionnelle, unissons-nous pour réaliser l'incroyable salto arrière et jouer un sale tour au temps en l'arrêtant, Big, Bang sur-le-champ. Nous pourrons ainsi chers amis recréer le monde. Incroyable n'est-ce pas! Quoi ? Je vous sens hésitants. Vous me dites qu'on ne peut échapper à sa nature humaine et qu'au lieu de l'améliorer nous pourrions l'empirer. Ouais, vous avez assurément raison. Oublions cette portion du projet, mais osons quand même le défi pour le simple plaisir de vivre intensément. Allez bonnes gens, nous en sommes capables, j'ai confiance en nous, le monde entier nous regarde les yeux rivés sur leur écran espérant que l'on accomplisse le miracle tant attendu qui sauvera une fois de plus l'humanité de sa perte. Prêts, pas prêts, allons-y... Oooh ! De se retrouver ainsi les jambes en l'air, la tête vers la terre, le cœur flottant à la dérive, ça donne le vertige. Entre nos deux oreilles, ça tourne, tourne et tourne tellement que finalement nous en perdons conscience pour nous retrouver bien éveillés tous et toutes ensemble dans cet espace intemporel lisant en chœur avec prestance et ferveur le dernier journal papier de L'annonceur. Pour clore en beauté, méga party, budget illimité, mangeaille et petits boires à volonté défrayés par la municipalité. Grâce à nos taxes bien évidemment. Au menu artistique. Tous les artistes qui ont œuvré au Belcourt durant mes années de service seront présents. Promesse d'ivrogne du chroniqueur. Que la fête commence et ne cesse de durer ! Voilà, c'est ainsi que l'aventure prend fin. Profitez pleinement du bonheur d'être vivant. Chemin faisant, partagez-en quelques doux instants. Le monde autour de nous en a bien besoin. Bonne route !